A l’occasion de la sortie de son dernier livre « Elon Musk – L’homme qui invente notre futur » , Tesla Magazine s’est entretenu avec son écrivain Luc Mary. Entre son enfance en Afrique du Sud, ses premières innovations jusqu’à l’affirmation de SpaceX et Tesla, Luc Mary revient sur la vie particulièrement mouvementée d’Elon Musk.
Vous pouvez retrouver ce livre dans la plupart des librairies et sur le site de la Fnac et Cultura.
Tesla Mag : Pourquoi avez- vous écrit un livre sur Elon Musk?
Luc Mary : Cela peut paraître étonnant, mais c’est la première fois que j’écris sur un personnage vivant ! D’habitude, j’écris sur des personnages qui sont morts depuis plusieurs siècles, comme Hannibal, Vauban ou Jeanne d’Arc. Mais je suis un historien qui s’intéresse aussi bien au passé qu’au futur. Elon Musk, c’est un personnage qui va marquer l’histoire. C’est un acteur essentiel de l’histoire en marche. Donc, comme le 20ème siècle a été celui de Von Braun, le père des fusées Saturne 5. Je pense que le 21ème siècle, au moins sur le plan spatial, sera celui d’Elon Musk. Pour moi, alors qu’il n’a même pas 50 ans et qu’il en est au tout début de son histoire, c’est d’ores et déjà un des personnages qui vont marquer ce siècle.
En fait, je fais un peu d’histoire au futur. C’est un peu un pari sur le futur, car je pense que c’est grâce à lui qu’on va réveiller le rêve spatial. C’est déjà fait depuis le vol de Crew Dragon du 30 mai 2020. Il a réveillé le rêve spatial en mettant l’homme au centre de l’exploration du cosmos. L’actualité le précise. C’est l’homme qui va décrocher de nouveau la Lune. Il vient de signer un contrat avec la NASA pour envoyer des hommes sur la Lune d’ici 2023. C’est un tremplin pour accéder à Mars, même si c’est autrement plus éloigné que la Lune.
C’est une espèce de rêveur réaliste. Il permet à l’humanité de se projeter dans le futur. Il sait que la terre est le berceau de l’humanité et que l’on ne peut pas rester éternellement dans un berceau, si on veut reprendre la phrase de Constantin Tsiolkovski. Pour survivre, l’humanité a besoin d’élargir le monde. À commencer par Mars, qui n’est autre qu’une terre sans les océans sur le plan de la surface.
TM : Vous avez parlé de cette relance d’ardeur et de rêve pour l’espace alors qu’ils avaient beaucoup diminué, il y avait beaucoup moins d’envie.
L. M. : Oui, depuis la fin de l’exploration Apollo, depuis que l’Homme a marché sur la Lune en 1972, l’humanité s’est un peu désintéressée de l’espace. La seule chose que l’on pouvait entendre de l’espace, ce sont les sondes interplanétaires qui prennent des photos des planètes lointaines, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune. C’est charmant. Il n’y a pas de doute, c’est très intéressant. Mais l’homme ne faisait pas partie de cette exploration du cosmos. Le 30 mai dernier, Elon Musk a fait d’un simple aller-retour vers la station spatiale internationale (ISS) un événement d’ampleur mondiale, pour lequel même Donald Trump s’est déplacé. Il a modernisé l’espace. Il a modernisé le rêve et parlé aux enfants. On aurait cru voir un vol issu d’une bande dessinée. Ce que voulait faire Musk, c’est parler aux enfants, parler aux futur marsionautes. Il a fait rêver avec un simple vol vers l’ISS.
TM : Oui, pour refaire rêver le monde à propos de l’espace, il a rendu ça accessible. Il a facilité l’accès et la compréhension pour tout le monde.
L. M. : Voilà. Il a démocratisé l’espace. La grande idée de Musk, c’est aussi que l’espace soit accessible financièrement en réduisant le coût des lancements. C’est-à-dire accéder à l’espace par des vols de moins en moins chers grâce à la réutilisation des lanceurs. C’est une idée spécifiquement Muskienne, le fait que l’on puisse récupérer les boosters et les étages, une fois qu’ils sont détachés. C’est la grande idée de SpaceX, la société spatiale fondée par Musk il y a presque 20 ans maintenant, puisque c’était en 2002. Aujourd’hui, dans l’imaginaire des enfants, ce n’est plus la Nasa qui fait rêver, c’est SpaceX. Et la Nasa, qui, au départ était plutôt l’adversaire de SpaceX, l’a sauvé. Ils ont quand même fait 100 lancements sans échec et Dieu sait qu’ils en ont connu des échecs, auparavant.
Dans mon livre, je raconte toute l’histoire de Falcon 1, la première fusée sur l’atoll des îles Marshall. Là, ils en ont bavé. C’était un espace très humide, inhospitalier, etc. Ils ont subi trois échecs en trois ans. Ils ont perdu des sommes énormes à raison de 100.000 dollars par jour. Ils ont réussi à faire décoller ce Falcon 1. Mais à quel prix ? Et ils étaient complètement fauchés. Et c’est cette même année, en 2008, qu’ils ont remporté le programme de service de transport commercial orbital de la Nasa pour ravitailler en hommes et en vivres l’ISS. La Nasa a en quelque sorte sauvé SpaceX.
TM : C’est un homme qui a toujours eu une force de motivation exceptionnelle, est ce que c’est ça aussi qui vous fascine ?
Je disais que c’était un rêveur réaliste. On peut dire aussi qu’il y a deux choses qui le caractérisent, c’est la persévérance et la patience. Il ne se décourage jamais, même ses échecs renforcent sa détermination. Pour lui, il n’y a pas de réussite fondamentale sans échec.
Trois fois, il échoue pour Falcon 1, trois fois pour Falcon 9. Il a aussi échoué 3 fois pour le Starship. Le fameux vaisseau qui doit transporter des hommes sur Mars d’ici peut-être 2030. De ce côté-là, Elon Musk ne renonce jamais à ses rêves.
Ses rêves, il les nourrit depuis l’enfance. Au lieu de jouer au foot avec les autres gamins, il préférerait construire des fusées dans son jardin, lire des livres de science fiction. C’est quelqu’un qui a toujours rêvé d’espace. Il veut réaliser ses rêves d’enfant. En fait, il est resté un enfant dans sa tête et il parle aux enfants. Pour lui, les enfants d’aujourd’hui sont les futurs colons de Mars. Il veut non seulement établir des bases sur Mars, mais aussi des villes avec des espaces de loisirs. Ce ne sera pas seulement une base scientifique comme l’Antarctique. Ce sera véritablement une seconde terre habitable. C’est un projet énorme. Pour lui, il y aura autant d’habitants sur Mars en l’an 3000 que sur Terre aujourd’hui. C’est vraiment un grand défi.
La spécificité de Space X, c’est d’avoir créé des sociétés à l’intérieur même de la société. Cela conduit à une révolution spatiale et à une révolution sociétale. Au sein des ateliers de Space X, en Californie, tout le monde se côtoie, les techniciens, les ingénieurs. Il n’y a pas de séparation, il y a une collaboration de classe. Il n’y a pas de distinction, de diplôme, de chef, etc. C’est une espèce d’égalitarisme spatial car tout est fabriqué sur place. Il ne font pas appel à des fabricants extérieurs. C’est aussi une spécificité de SpaceX.
TM : De ce point de vue là, il a aussi relancé le rêve américain aux Etats-Unis à l’image des premières conquêtes spatiales.
L. M. : Il ne se bat pas forcément pour l’Amérique, mais pour la Terre entière. Son projet n’est pas un projet américain, c’est un projet terrien. C’est au nom des Terriens qu’il se bat, au nom de son propre idéal. Mais ce n’est pas au nom d’un pays, même s’il adore les États-Unis.
S’il n’y avait pas SpaceX, on ne parlerait pas d’Elon Musk, c’est ce qui fait sa spécificité. Mais Musk est un touche-à-tout. Il a aussi révolutionné la voiture électrique avec Tesla, il y a aussi l’Hyperloop, Open AI, Neuralink, etc. Il s’intéresse à l’avenir sur terre et dans l’espace. Ses deux grandes passions sont aussi le respect de l’environnement et la technologie.
En fait, ce qui m’intéresse chez Musk, c’est qu’il essaie de concilier son amour de la technologie et son amour pour l’environnement, ce qui semble a priori incompatible.
TM : Vous avez écrit beaucoup de livres historiques, mais aussi sur l’espace, est ce que c’est difficile d’écrire sur quelqu’un, à l’instar de vos précédents livres sur Lénine ou Raspoutine, qui est encore vivant et sur des sujets qui sont amené à changer sans cesse ?
L. M. : Quand vous écrivez un livre sur quelqu’un qui vit encore, parfois, vous êtes obligé de remanier le livre en fonction des nouvelles d’actualités. J’ai commencé à écrire ce livre en 2019 et depuis, il s’est passé beaucoup d’événements. Il a donc fallu y intégrer des nouvelles données. Je pense que l’avenir de Musk est plus riche que son passé. C’est beaucoup plus difficile. Mais en même temps, c’est un autre défi parce que je suis un peu comme Elon Musk j’aime bien les défis.
TM : A première vue, le livre paraît difficile à appréhender, on s’attend à une myriade de thèmes compliqués au final, la lecture est très facile. Est ce que c’était aussi une volonté de rendre tout ça accessible pour tout le monde?
L. M. : J’ai voulu recentrer le débat sur SpaceX. Je voulais raconter au jour le jour ce qu’il se passait pour rendre le livre vivant même s’il y a des détails techniques évidemment. J’ai l’habitude de raconter des histoires avec mes livres historiques et en plus, j’ai une passion pour l’espace. J’ai voulu axer surtout le livre sur l’espace mais il y a aussi deux chapitres consacrés à Tesla . Il a voulu faire des voitures aussi de plus en plus autonomes avec ses batteries et ses Gigafactory.
Il veut faire un espace low cost et démocratiser l’espace. Il veut faire en sorte que n’importe qui puisse aller dans l’espace et pas seulement les plus riches. Aujourd’hui, n’importe qui ou presque peut se déplacer aux États-Unis en prenant l’avion. Dans un siècle, on pourra peut-être aller sur Mars ou sur les principaux satellites de Jupiter en prenant une navette hyper rapide. Le système solaire est encore trop grand pour nous, mais ce qui est sûr, c’est que la terre, pour lui, est trop petite pour les Terriens.
TM : Cette démocratisation de l’espace et du voyage spatial, c’est un peu la même volonté avec Tesla en démocratisant le véhicule électrique.
L. M. : C’est la même logique. Faire une voiture propre, silencieuse et bon marché. Et aujourd’hui, Tesla, vingt ans après sa création, compte plus de 50.000 personnes dans le monde et plus de 10 000 voitures qui sortent des usines chaque semaine. Tesla obéit aussi à cette obsession d’Elon Musk de vouloir réduire la part du pétrole dans les énergies à venir. Sa grande idée, c’est de développer beaucoup de batteries et d’augmenter l’autonomie des voitures.
Le point commun entre toutes ces innovations, c’est la réduction des coûts. Faire en sorte que l’environnement de demain soit moins polluant et que la technologie se conjugue mieux avec l’environnement.
TM : Est ce que vous avez prévu de faire un deuxième livre sur Elon Musk et SpaceX dans plusieurs années ?
L. M. : Dans dix ans, je referai peut-être un livre sur Musk. D’ici la, il se sera passé ou dans le mauvais sens ou dans le bon sens d’autres événements, on aura sans doute reconquis la Lune, on aura peut être posé le pied sur Mars. C’est ça qu’on retiendra dans l’histoire. Elon Musk n’a pas encore réaliser complètement ses rêves. Ce ne sera pas seulement un pied mais ce serait le premier pas pour une future colonisation de cette planète qui sera un nouvel espace de vie. Donc, on peut dire de Musk qu’il a les pieds sur terre et la tête dans Mars. C’est quelqu’un qui fourmille d’idées et l’avenir d’Elon Musk est certainement beaucoup plus riche que son passé. C’est dommage qu’il n’y ait qu’un seul Musk par siècle !
« Elon Musk, l’homme qui invente notre futur » – Luc Mary. Edition l’Archipel paru le 6 mai 2021.
ISBN / 2809841977, 9782809841978
Interview: Mattéo B / Photos DR: Editions de l’Archipel, Tesla Mag, Tesla
Quelle horreur !! j’espère que l’homme restera toujours dans son sublime berceau qu’est la Terre. Elon Musk devrait plutôt réfléchir à sauver la Terre plutot que de polluer l’espace ce qui aura forcément des conséquences dramatiques sur notre Terre. Il faut changer de priorité et arrêter d’idolatrer cet homme néfaste…
Avec ce raisonnement ,nous en serions encore à l’époque des cavernes !!!!!